(...) "La Casamance2, cette région naturelle et lointaine riche de son histoire et de sa diversité culturelle, de sa végétation luxuriante et de ses belles plages qui attirent les voyageurs en quête de découvertes et de plaisir, est un endroit paradisiaque. Située au sud-ouest du Sénégal, elle est bordée par la Gambie, au nord, la Guinée-Bissau et la Guinée au sud, à l’est, par la région de Tambacounda et à l’ouest, par l’océan Atlantique. En dignes fils et filles du terroir, nous aimons notre fascinante et verte Casamance et nous en sommes très fiers !
J’aurais pu passer des heures et des heures à vous parler de cette merveille que Dieu a mise entre nos mains, je ne m’en lasserai pas et je ne finirai jamais d’en égrener les perles. Tel un chapelet récité avec dévotion, la Casamance, ce cadeau si précieux à nos yeux que nous avons hérité de nos ancêtres, est pour nous, ses enfants, un joyau délicatement posé dans son écrin de verdure doucereuse et que nous chérissons avec beaucoup d’amour.
Cette citation d’André Malraux, poète, ministre de la Culture français sous Charles de Gaulle, en est une parfaite illustration. Invité par le poète-Président Léopold Sédar Senghor lors du premier Festival mondial des arts nègres, en 1966, il avait été fasciné par cette belle région :
« Je suis allé en Casamance. J’en rêvais depuis longtemps, à cause du mot romance et des chansons des îles. »
Il en est de même de cet extrait tiré de l’avant-propos du livre de Christian Roche, Histoire de la Casamance : Conquête et résistance : 1850-1920 :
« La Casamance ne laisse personne insensible quand elle apparaît pour la première fois aux yeux du voyageur. Que l’on soit attiré par le tourisme ou par la vie professionnelle, elle laisse à tous ceux qui l’ont connue un souvenir durable, voire ineffaçable. La beauté de sa nature généreuse, illuminée par un soleil éclatant huit mois de l’année, la douceur et la gentillesse de ses populations sont des bienfaits recherchés par l’homme fatigué des aspects néfastes de la civilisation industrielle »3
Hélas ! Les nombreux traitements et injustices subis à l’époque de la colonisation française, suivis des années plus tard, après l’accession de notre pays à la souveraineté internationale, d’une succession de griefs longtemps contenus et dénoncés par les populations, n’ont jamais trouvé une oreille attentive. Pis, même portés à l’attention du pouvoir central, faisant suite à des pratiques malsaines et déshonorantes de l’administration locale, ceux-ci n’ont jamais été pris au sérieux ni résolus. Voilà comment, petit à petit, et après avoir été poussées à bout à plusieurs reprises, les populations ont décidé d’organiser une marche pour manifester leur colère et demander un peu plus de considération. C’était sans prévoir que les choses allaient dégénérer ce dimanche 26 décembre 1982 et prendre une tournure sanglante, à la surprise générale. Depuis, l’adrénaline est montée d’un cran, surtout après les nombreuses arrestations arbitraires et les transferts des détenus vers Dakar. Depuis, un voile sombre et un sentiment de tristesse ont pris en otage cette belle région et toute sa population, mettant cette partie du pays à feu et à sang. Et depuis, les populations vivent en sursis, dans la peur du lendemain, un lendemain plein d’incertitudes, avec son lot d’horreurs dont sont victimes toutes les couches, sans exception. (...) (P. 18, 19, 20)